La Neige n’est pas la mort. Le Jeune Naturaliste.

Le Caribou des Toundras, une oeuvre de l’illustrateur canadien James Nathaniel (Jim) Simpkins (1910-2004), reproduite en tons de gris dans le numéro de mars 1959 de la revue Le Jeune Naturaliste (vraisemblablement une aquarelle). L’illustration proviendrait des archives de l’Office National du Film du Canada à Ottawa où Simpkins a travaillé .


« Viens sur la neige, car la neige n’est pas la mort; la neige est un repos ou un moment dans la vie … »

L’objet de cet article, c’est la reproduction en format pdf (cliquer sur le lien à la fin de l’article) de dix-sept exemplaires que j’ai trouvés par hasard, publiés entre 1954 et 1961, de la revue Le Jeune Naturaliste, considérée comme «l’ancêtre» de la revue Québec Science.

Le titre de cet article, La Neige n’est pas la Mort, c’est aussi le titre de l’éditorial (pas un article scientifique) du plus ancien des numéros (février 1954) que j’ai trouvés. C’est un texte «poétique» très simple qui me touche par sa naïveté tout autant que par sa vérité; le voici (le texte commence sous la photo des poissons des chenaux) :

Pêche d'hiver aux poulamons, ou aux «petits poissons des chenaux» dans la région de la ville de Trois-Rivières au Québec - ou encore, la «pêche aux petites morues». Photo prise au Québec, vraisemblablement au début des années 1950s. Elle provient du journal Le Nouvelliste de Trois-Rivières et elle est reproduite dans Le Jeune Naturaliste de f'évrier 1954.

Pêche d’hiver aux poulamons, ou aux «petits poissons des chenaux» dans la région de la ville de Trois-Rivières au Québec – ou encore, la «pêche aux petites morues». Photo prise au Québec, vraisemblablement au début des années 1950s. Elle provient du journal Le Nouvelliste de Trois-Rivières et elle est reproduite dans Le Jeune Naturaliste de f’évrier 1954.

Lynx du Canada ou loup-cervier. La photo daterait des années 1950s. Photo tirée de la revue.

La Neige n’est pas la Mort

«Viens sur la neige, car la neige n’est pas la mort; la neige est un repos ou un moment dans la vie.

«La neige n’est pas la mort pour ceux qui sont à l’abri, protégés par la maison des hommes, comme l’attagène qui se tortille dans la laine de nos moelleux tapis pendant que dehors le froid fait fendre et les clous et les planches.

«La neige n’est pas la mort pour ceux qui savent courir, gambader, monter ou descendre les pentes, pendant que la Lune, de sa lampe froide, éclaire les étroits sentiers. Tu vois le lièvre et, à sa suite, celui qui veut le croquer, le renard ou le gros chat loup-cervier.

«La neige est un moment dans la vie des petites-morues qui, suivant un mystérieux instinct, nagent vers les eaux des tributaires afin d’y laisser leurs innombrables oeufs. Telles des pèlerins d’un autre âge, elles ne craignent ni la neige, ni le froid qui ont tissé une toile sur la mer.

«La neige n’est qu’une lueur pour les mondes qui gravitent dans l’espace. Plusieurs ne connaissent que le froid. Et leur soeur habillée de neige resplendit en un «clair de Terre », une veilleuse de plus dans l’immense univers.

Dessin de C. E. Johnson: loup-cervier (lynx du Canada). L’illustration est tirée du numéro trouvé le plus ancien (février 1954); la photo provient du Musée National du Canada à Ottawa.

«La neige est un moment de joyeuses farandoles pour ces ailes frémissantes, pour la perdrix qui sait dormir, bien assise dans la neige, la mésange qui trouve son pain sur un sol sec et désert.

«La neige n’est pas la mort pour nous qui entendons les battements rythmés de la pie, à travers la glace de l’étang, dans le ciel froid de ces parcs blanchis ou sur le sol qui refait ses forces, bien enveloppé d’une cotonneuse chemise.»


 

Le texte qui précède est anonyme mais il est sans doute attribuable au rédacteur en chef et créateur de la revue, Léo Brassard; si vous  reproduisez le texte qui précède, ce serait bien d’en indiquer la source et le nom de l’auteur présumé.

La pêche hivernale à la «munie», ou à la «loche» (la lotte américaine de l’Est) sur la surface glacée et enneigée du Lac Saint-Jean. Photo tirée du numéro d’avril 1961.

Un lièvre dans le bois en hiver, dessin du père Réal Aubin, c.s.v. Ça ressemble beaucoup à la photo d’une gravure sur bois. Tirée du fascicule de février 1954.

J’ai acquis ces dix-sept exemplaires pour une fraction d’une bouchée de pain (avant la hausse récente du prix des céréales …), pour une fraction d’un dollar canadien (environ 0.50 cents), autour de 2002 ou 2003, dans une vente de garage en Haute Matawinie, au Québec. Les quelques exemplaires en question avaient été publiés entre 1954 et 1961.

La revue elle-même aurait été enregistrée en 1951 si on en juge par les indications qu’on trouve dans les numéros eux-mêmes, mais elle existerait, en fait, depuis 1950. On lit ceci dans le numéro de  septembre-octobre 1959 (pdf) sous la plume du créateur de la revue, Léo Brassard, Clerc de Saint Viateur (c.s.v.) :

«C’était en septembre 1950. Nous commençions à servir une petite population d’intéressés. Nous avions offert des textes et des images sur la nature canadienne. Régulièrement, chaque mois des années scolaires, nous avons maintenu notre modeste service d’information. Et les numéros se sont succédés, les années aussi… Nous nous acheminons lentement vers la 100e livraison!»

En passant, si vous cherchez sur internet, vous apprendrez encore et encore que Le Jeune Naturaliste (sous ce titre) existe depuis 1955, ce qui ne tient pas, le premier numéro de la série incomplète du Jeune Naturaliste que j’ai trouvée par hasard datant de février 1954, un an avant. Et je n’ai pas tous les numéros. C’est un exemple mineur, mais un très bon exemple néanmoins, d’une erreur historique reçue et qui se répète et se multiplie par la force d’un argument d’autorité. On pourrait appeler ça un pattern.

Par ailleurs, Le Jeune Naturaliste serait l’ancêtre de la revue québécoise contemporaine Québec Science qui existerait depuis 1969. Le Jeune Naturaliste se serait appelée Le Jeune Scientifique pour un temps, entre 1962 et 1969 nous dit-on (ici, entre autres). On nous dit aussi que la revue Le Jeune Naturaliste se serait auparavant, au tout début, appelée Le Viateur Naturaliste (ici). Le journal Le Devoir a déjà publié un article sur l’historique des cercles des jeunes naturalistes au Québec. Pour ceux que ça intéresse, cliquer ici.

Je trouvais absurde de laisser dormir ces exemplaires sans les offrir, entre autres parce que, en dépit d’une présentation modeste, ils peuvent être utiles. Et puis, il y a ce sentiment indéfinissable qu’on peut éprouver à les lire.


Cerf de Virginie. Photo tirée du numéro d’octobre 1960.

Des numéros appartenaient à une certaine Suzanne Éthier. D’autres appartenaient apparemment à un prêtre catholique du nom de Rosaire Corbin. Son nom est imprimé au tampon sur un grand nombre de numéros. Je ne connais pas Rosaire Corbin, ni Suzanne Éthier, je ne sais rien d’eux, mais je les salue à travers le temps.

L’intérêt de ces exemplaires (noirs et blancs, la couleur coûtait trop cher à l’époque), au-delà de l’émotion qu’on peut éprouver à les découvrir et à les parcourir, est d’abord leur contenu, simple, facile à lire, instructif, même si les textes sont rédigés à l’intention d’ados ou de pré-ados. Ils portent tous essentiellement sur la faune et la flore du Québec – mais pas exclusivement: un fascicule porte sur le Zoo de Granby, au Québec.

Dessin de couverture représentant un harfang des neiges :)  Illustration provenant du numéro de décembre 1960. Le dessin du harfang et la page couverture sont du père Max Boucher, Clerc de Saint-Viateur  (c.s.v.).

Ces modestes fascicules, bénévolement conçus, rédigés avec compétence, témoignent certainement de l’intérêt réel et concret que les Clercs de Saint-Viateur portaient au milieu naturel, et de leur souci d’en transmettre une connaissance théorique, mais aussi affective (avec un «a»), efficace, applicable, pratique.

Si vous trouvez des erreurs dans cet article, je serais heureux que vous me les signaliez.

On peut accéder directement à tous les fichiers pdf en cliquant ici:

La neige n’est pas la mort – ou Le Jeune Naturaliste – 1954-1961 – dix-sept  exemplaires que j’ai trouvés par hasard.

Les fascicules portent la mention: «Tous droits réservés, Ottawa, 1951.»

Ces textes témoignent de l’esprit d’une époque, surtout les éditoriaux, souvent naïfs – certains me touchent, certains sont justes, certains m’irritent par leur conformisme intellectuel, comme celui de novembre 1954. Mais je les aime tous. Ils sont reproduits sur ce blog under fair use à des fins documentaires, historiques, éducatives, culturelles, non-commerciales.


© Copyright 2010 Hamilton-Lucas Sinclair (Loup Kibiloki, Jacques Renaud, Le Scribe), cliquer


 

L’Agonie d’un Chasseur, ou Les Métamorphoses du Ouatever – novella

Winter Evening by Émile Nelligan : A new English translation of Soir d’Hiver  («Comme la neige a neigé .. ») ; avec la version française de Soir d’Hiver.

La terre tremble pendant des mois en 1663 au Canada. Des montagnes, des rivières, disparaissent.  —  Le vrai portrait de Marguerite Bourgeoys par Pierre Le Ber. Un chef d’oeuvre d’art naïf.

Arrêtez de raser les parterres et de massacrer les plantes sauvages! Laissez la Vie Vivre!  –    Terrorisme domestique et destruction de potagers par les municipalités : Aux profits de quel lobby ?   –    Invasions de domiciles : Tout se passe comme si on voulait abolir la légitime défense.   –   Formule 1 et chaises roulantes : Non à la pollution sonore et sciante

Do you remember Chernobyl? Nuclear disaster contamination: apparently worse than previously thought...   —   Waging Total Nuclear War against Humanity and Human Genes: Nuclear Radiation and Uranium 238 (DU)


 

Loup Kibiloki ( Jacques Renaud )  :    Plusieurs suites poétiques de Loup Kibiloki ( Jacques Renaud )   –  Beaucoup de poèmes de Jacques Renaud ( Loup Kibiloki )  –  Des poèmes à Shiva –   Des histoires, des comptines, des contes.  En prose ou en versets libres.  Parfois bizarres, parfois pas.   –   Toutes les terrasses du monde s’ouvrent sur l’infini. On va prendre un café ensemble. Poème. « Toujours, tu rencontreras Rimbaud dans les rues vermillonnes et safranées de Marrakech … »


 

Suites poétiques, Loup Kibiloki ( Jacques Renaud )  :   Les Enchantements de Mémoire  – Sentiers d’Étoiles  –  Rasez les Cités  –  Électrodes  –  Vénus et la Mélancolie  –  Le Cycle du Scorpion  –  Le Cycle du Bélier  –  La Nuit des temps  –  La Stupéfiante Mutation de sa Chrysalide


 

Un chic chat dans l’coma   –  Un ballon dans un cochon    —   Elle a trop bu de jus d’ tortue

Le miracle de l’écrivain dans l’donjon   –  Petit Matou (paroles pour chanson de plage et d’été, tendre, kétaine et rythmée)    –   La pluie, de ses dents rondes et bleues  –  Filez, filez, ô mon navire – (poème qui se chante) (et bateau d’avril)

Un coup bavant du Grand Avide, ou Kafka aurait pu l’dire

La Fable de Crassus le Gigueur, ou comment ouvrir la terre sous les armées   –   Le Cliquetis de la croquignole   —   La logique est une muette qui ne cesse de nous faire signe   –   La soeur d’Absalon, ou le ciel et l’enfer interdits aux comiques


Blogsurfer.us –  Icerocket

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6 Responses to La Neige n’est pas la mort. Le Jeune Naturaliste.

  1. Merci pour la mise en ligne des numéros du «Le Jeune-Naturaliste», la vision de M. Brassard se poursuit désormais ici : http://www.explosnature.ca/mission/ nous n’avons pas ces vieux numéros dans nos archives. Pour votre information et votre curiosité, le prête M. Rosaire Corbin a été (entre autres) le directeur du Centre écologique de Port-au-Saumon et il a grandement contribué à la création du Parc marin Saguenay-Saint-Laurent. Un prix porte désormais son nom, il est remis pour souligner la contribution d’une personne ou d’un organisme à la mise en valeur du patrimoine culturel et naturel du fjord du Saguenay.

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    • Grand merci pour ces informations.

      ( Les circonstances font que je n’ai plus les supports-papiers de ces numéros (comme de beaucoup d’autres imprimés, d’ailleurs ) – sinon, croyez-moi, je m’empresserais avec plaisir de vous les faire parvenir sur-le-champ pour vos archives.

      Mais au moins, ils existent encore virtuellement et peuvent être ré-imprimés avec une imprimante. C’était mon but en les “scannant” :)

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